Partenariats, publicité, chefs influenceurs: les bonnes recettes de Top Chef - Challenges
La finale de Top Chef se déroulera ce mercredi 15 juin sur M6, mais on sait déjà que tout le monde sera gagnant. Avec un format qui attire toujours les cibles commerciales chères aux annonceurs, le concours culinaire fait le bonheur des candidats, des jurés, des marques partenaires et bien évidemment de la chaîne. Le show culinaire a même annoncé créer son premier bistrot à Suresnes, dans les Hauts-de-Seine, qui servira des plats issus du concours. Il ouvrira le 8 juillet, mais l'on peut y réserver une table dès ce jour de finale - rien n'est laissé au hasard. Le projet vient s'ajouter à une boutique en ligne de matériel de cuisine, en partenariat avec le coutelier TB (Top Chef et TB se répartissent les bénéfices), ou à des menus de l'émission livrés par Uber Eats. Un business aux rouages bien huilés.
L'attrait pour les annonceurs
Premier élément du succès commercial de Top Chef, adaptation d'un format américain: son attrait pour les annonceurs. "Les licences qui sont les plus demandées en France sont Top Chef et Koh-Lanta", explique Jérémy Valet, directeur de M6 Unlimited, agence intégrée à M6 Publicité. Le dernier numéro de l'émission, le 8 juin 2022, a été regardé par 24% des femmes responsables des achats de moins de 50 ans devant leur poste ce soir là. Le concours de cuisine de M6 s'offre le luxe de doubler le leader TF1 sur cette cible. "L’attrait d’une licence c’est beaucoup plus que les audiences, ajoute Jérémy Valet. La force de Top Chef est d'être une référence d'excellence dans l’univers food." Virginie Spies, sémiologue spécialiste de la télévision, ajoute: "L'émission est conçue pour être entourée de publicités alimentaires. Les annonceurs préfèrent se positionner sur ce type de programme qu’entre deux séries." Selon Philippe Nouchi, directeur de l'expertise média chez Publicis Media interrogé par Les Echos en 2019, les écrans publicitaires pour un tel niveau d'audience se vendraient entre 40.000 et 55.000 euros bruts. Jérémy Valet n'avance pas de chiffres mais déclare que Top Chef est "extrêmement rentable".
"Marketing du bonheur"
Pour les marques, être associées à Top Chef est bénéfique, continue Virginie Spies, qui est maîtresse de conférences à l'université d'Avignon et des Pays de Vaucluse: "L'émission est positive, associée à des valeurs de dépassement de soi. C'est le Koh-Lanta de la cuisine! Les marques y font du marketing du bonheur." Pour une marque comme Uber Eats, qui à travers "un partenariat 360°" diffuse des publicités et livre des menus Top Chef, l'enjeu est de gagner en visibilité mais aussi d'améliorer son image. La marque détaille: "Suite au partenariat en 2021, nous avons gagné 22 points pour la perception de la qualité des plats proposés et 19 points pour la diversité proposée sur l’application." Bref, Uber Eats s'éloigne de l'image du fastfood. Top Chef (détenu par M6 et NBC, le groupe américain créateur de l'émission), de son côté, tire des revenus de l'exploitation de sa licence par Uber et promeut son émission.
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Les partenariats s'immiscent dans les moindres détails. Les couverts avec lesquels mangent les chefs sont fournis par Degrenne, spécialiste des arts de la table. Géraldine Hottier-Fayon, à la tête du groupe, explique: "On est aussi partenaires sur la vaisselle, mais là, ce n'est pas une exclusivité. D'autres marques sont rentrées." Signe que les passages dans Top Chef sont très demandés. Jérémy Valet explique: "La législation fait qu’on ne peut pas voir les logos des marques durant l'émission, mais quand les modèles sont identifiables, on peut les reconnaître au premier regard". Vaisselle, légumes, mobilier, décors... Ce type de partenariat est gratuit, mais permet à M6 "un allègement du coût de production du programme" grâce à ces approvisionnements "gagnant-gagnant".
Les chefs, nouvelles stars
Outre la visibilité à la télé, Degrenne surfe sur la vague Top Chef dans ses boutiques. La marque commercialise son assortiment de vaisselle Top Chef, ainsi que le célèbre couteau que les candidats tirent de son étui pour savoir s'ils sont éliminés, conçu par le coutelier TB. Si Géraldine Hottier-Fayon ne quantifie pas les bénéfices tirés de l'émission, elle assume que Top Chef est aussi pour elle l'occasion de rentrer en contact avec des chefs cuisiniers, pour signer des partenariats qui continueront après la diffusion.
Le bistrot Top Chef, quant à lui, est un "test", reconnaît Jérémy Valet, sur lequel M6 ne fait pour l'instant qu'apposer - et vendre - sa licence. L'objectif, en cas de succès, serait de créer de nombreuses enseignes. M6 serait alors actionnaire du projet, sur le modèle des 657 agences Stéphane Plaza Immobilier, du nom de l'animateur star de M6, contrôlées par le groupe. Le business de Top Chef est décidé à continuer à se diversifier.
Mais M6 et les marques ne sont pas les uniques bénéficiaires de l'émission. Pour les chefs, candidats comme membres du jurys, les retombées économiques sont énormes. Au point de transformer le métier. "Depuis quinze ans, les chefs étoilés sont devenus une nouvelle catégorie de stars", analyse Virginie Spies. Preuve de cette nouvelle peoplisation des cuisiniers de l'émission: bon nombre d'entre eux font appel à des agents.
"Je gagne dix fois plus pour un post Instagram qu'en cuisine"
"Je gagne ma vie par le biais de la télé et d’Instagram, assume Justine Piluso, candidate de la saison 11, à la tête du restaurant parisien éphémère "Les Petites Mains" et depuis peu animatrice sur France 3. La cuisine, c’est ma passion, mais ce n’est pas ça qui renfloue les caisses de ma société." Car après l'émission, la cheffe a créé son entreprise, divisée en deux sociétés: une portant sur "l'image", l'autre sur la restauration et le consulting. Son mari, quant à lui, est devenu son manager. Et les partenariats avec les marques et labels s'accumulent: Jardin Bio Etic, les produits tripiers, la pomme de terre de primeur... Pourtant, Justine Piluso déclare accepter moins de 10% des propositions. La cuisine reste sa passion, mais elle reconnaît, à regret: "Je gagne dix fois plus pour un post Instagram qui me prend une heure à réaliser, que quand je travaille 17 heures par jour en cuisine."
Capture d'écran d'une publication de Justine Piluso sur Instagram de septembre 2021: elle y met en avant son partenaire Lagostina France, fabricant d'articles culinaires et obtient près de 10.000 mentions "j'aime".
Voitures, équipementier sportif et club de rugby: des partenariats "en pagaille"
Pierre Augé, participant de la première saison de l'émission en 2010 et gagnant de la cinquième saison, accumule aussi les partenariats. "J'en ai conclu en pagaille", rit-il. Le chef a collaboré avec le sel La Baleine, le robot de cuisine Suavinex, ou a été ambassadeur d'Aldi. Depuis deux ans, il est aussi ambassadeur du Label rouge. "Les partenariats, c’est bien quand ça correspond à ce que l'on fait", avertit-il, reconnaissant avoir fait des erreurs en réalisant certains deals dans l'industrie agroalimentaire.
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Le chef compte près de 100.000 abonnés sur Instagram - réseau sur lequel il se présente encore comme le "gagnant de Top Chef saison 5". " Ca coute des sous, il faut investir pour prendre de bonnes photos", s'amuse-t-il. Pierre Augé a écrit trois livres de cuisine et une bande-dessinée. Il a son propre restaurant, "La maison de Petit Pierre", à Béziers. Pour l'acheter et contracter un emprunt, la notoriété post-Top Chef a aussi été un sacré coup de pouce.
Florian Barbarot, jeune trentenaire et candidat de la saison 10 du programme, a aussi pu acheter son restaurant parisien "Quelque part...", sans même faire appel à des investisseurs extérieurs, grâce à ses nombreux partenariats. "Je suis ambassadeur de marques comme Kia, Socopa, le Coq sportif", détaille-t-il. "Je pense que ça fait partie du métier des chefs modernes", déclare-t-il. L'ex-candidat collabore avec un hôtel cinq étoiles à Dubaï et est même consultant pour le club de rugby de Montpellier. Pas de doute, Top Chef n'est pas qu'un bon business - l'émission a transformé le métier de chef cuisinier.
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